À priori intégrer un jeu dans son cours semble contraire à ce qui définit traditionnellement l’apprentissage en classe, car le jeu semble plutôt synonyme de distraction et de frivolité. Pourtant, on entend parler depuis quelques années de l’apprentissage par le jeu, voire de jeux sérieux dans l’enseignement supérieur. De quoi parle t-on ? Dans quelle mesure le jeu est pertinent dans un enseignement ? Quel investissement pour l’enseignant ?
L’apprentissage comme le jeu sont des activités humaines qui présentent de nombreux points communs : on peut apprendre en jouant et inversement.
Gilles Brougère, chercheur en sciences de l’éducation spécialisé dans la question du jeu, propose dans son ouvrage « Jouer/Apprendre » cinq caractéristiques qui visent à définir ce qu’est une activité ludique :
Le second degré : |
La décision : |
La règle : |
La frivolité : |
L’incertitude : |
Dans un contexte de cours où ce qui est évalué d’abord sont des savoirs formels et structurés, les activités pédagogiques comme l’exposé ou les exercices d’application suffisent en général. Les critères du jeu rentrent peu en considération .
En revanche, l’activité ludique devient pertinente lorsque l’on cherche à :
- évaluer une situation complexe, comme par exemple un savoir-faire technique, un savoir-être. Alors, les critères de décision, de règle et d’incertitude peuvent rentrer dans l’équation de l’évaluation.
- agir sur la motivation intrinséque et/ou extrinséque de l’élève. Le plaisir découlant de l’expérience de jeu peut se conjuguer avec celui d’apprendre ou le suppléer.
- améliorer la concentration sur des tâches spécifiques. L’expérience de jeu maintient l’attention un peu comme pour l’apprentissage d’un instrument, elle permet sur des tâches déterminées d’obtenir un meilleur contrôle exécutif au sens de la psychologie cognitive.
- se rapprocher des habitudes et des expériences des élèves, notamment sur le plan des usages des outils numériques.
Exemple : Utiliser un outil de quizz numérique dans sa classe, Kahoot
Exemple : La simulation de gestion de crise à l’École des Ponts
Le serious game ou jeu sérieux se définit comme une application informatique, dont l’objectif est de combiner à la fois des aspects sérieux (serious) tels, de manière non exhaustive, l’enseignement, l’apprentissage, la communication, ou encore l’information, avec des ressorts ludiques issus du jeu vidéo (game). Il s’agit de l’objet le plus complexe mêlant pédagogie et jeu. Plus qu’une simple simulation, un serious game demande d’une part une scénarisation poussée et d’autre part un mécanisme de jeu ou gameplay efficace.
Exemples :
Escape Classroom : un jeu pédagogique pour enseigner l’optimisation combinatoire
Mecagenius, un serious game sur le génie mécanique
Echelle de valeur : + peu, ++ moyen, +++ très
Gamification | Simulation | Serious Game | |
Complexité scénaristique | + | + | +++ |
Complexité technique | + | +++ | +++ |
Divertissement | ++ | + | +++ |
Temps de production | + | +++ | +++ |
Assimilation pour l’apprenant | +++ | + | ++ |
Transposition du dispositif | +++ | + | + |
Les jeux publicitaires ou advergame visent à faire la publicité d’un thème, sensibiliser le public à une cause. Ils proviennent aussi bien d’entreprises privées que d’organismes publics et ont pour but principal d’influencer ou d’informer l’opinion sur un sujet. Exemple : |
Les jeux de management ou business games placent le joueur dans une situation professionnelle, la plupart du temps, de décideur afin d’évaluer l’impact des décisions. Exemple : |
Les jeux de formation ou learning games sont pleinement dédiés à la formation et à l’apprentissage. Ils visent la transmission de savoirs, savoirs-faire ou savoirs-être. Exemple : |
Dans le cas des écoles d’ingénieurs, on privilégie les deux derniers types de jeux.
On peut aussi aborder les jeux selon le type de gameplay :
La simulation peut être comportementale (ex : conduire un entretien) ou technique (ex : conduire un véhicule) et à pour but de reproduire de la manière la plus réaliste possible une procédure à appliquer dans un environnement donné. |
Le jeu de rôle qui peut être vu comme une variante de la simulation met davantage l’accent sur la personnification. Le joueur incarnant un personnage évolue dans un univers donné effectue des actions qui ont des répercussions sur ce dernier. |
Le jeu de gestion donne au joueur la possibilité de gérer un système en agissant sur des paramètres définis de manière à garantir le meilleur fonctionnement possible. |
Le type de gameplay est propre cette fois-ci plus généralement au jeu vidéo. Cette classification est non exhaustive, mais donne un aperçu des jeux les plus répandus.